Les autres tapis de l’Azerbaïdjan iranien
Au nord de Tabriz, un certain nombre de villages vivent du nouage du tapis. Le centre le plus important se situe autour de Hériz dont les tapis assez épais et au nouage assez grossier enchante nos salles à manger depuis le début du siècle. Robuste et facile à vivre, rustique mais avec des tons chaleureux on le reconnaît facilement à son médaillon stylisé qui n’utilise que des lignes droites ou obliques. Depuis quelques années on trouve de nouveau de très beaux hériz au velours épais et moelleux, dont la laine filée à la main est teintée avec des couleurs végétales.
Autour de Hériz on peut distinguer Mérovan dont les tapis sont souvent sans médaillons, Goravan à la qualité de laine plus mate, Charabian dont les dessins commencent légèrement à s’incurver ou Ahar aux tapis rigides comme des planches.
Un peu plus au nord Karadja avec ses médaillons multiples, son nouage à plat et sa trame unique. On s’y spécialise actuellement dans les tapis de passage.
Encore plus au nord, Ardébil, produit le plus « caucasien » des tapis iraniens. Dans les années 1970 on y trouvait de curieux tapis à motifs et nœuds senneh.
On peut encore remarquer au bazar de Tabriz de très jolies galeries au couleurs lumineuses nouées à Mechkin ou des kilims qui utilisent la technique des Soumaks.
Aucune autre région productrice de tapis ne présente une plus grande variété de sortes et de motifs que l’Iran.
Dans Torba 2/99, nous avons décrit un Heriz à fond rouge, sans médaillon. En voici un autre, complètement différent tant par ses coloris que par son dessin.
Ce qui frappe au premier abord, ce sont le fond jaune paille et la bordure or. Puis on remarque le grand médaillon bleu foncé, qui évoque une tarentule ou un scorpion. Ces motifs effrayants sont destinés à éloigner les mauvais esprits et à protéger celui qui occupe le tapis. Cette fonction de refuge du tapis a été étudiée par les ethnologues; le professeur Jean Gabus parle des nomades Nemadi du Sahara qui, ne disposant pas de tapis «choisissent chaque soir pour dormir un sable blanc et fin, le Trah el Ali (le sable d’Ali), leur tapis du pauvre. Pour être protégés pendant la nuit, ils esquissent du bout des doigts les signes du scorpion, de la tarentule... ». Le nomade, seul dans la montagne entre ciel et terre connaît la force des éléments et a besoin de se rassurer. Le tapis lui procure ce refuge.
La bordure frappe aussi par son motif de serpent. En fait il s’agit d’une arabesque florale qui s’est peu à peu transformée.
Ce Heriz est moins fin que celui du Torba 2/99 puisqu’il compte environ 100'000 nœuds/m2 au lieu de 200'000 nœuds/m2. La palette de ses coloris est moins riche. Par contre il est plus ancien et date du début ou du milieu du XIXème siècle. Son motif a souvent été repris par la suite dans des tapis du village voisin de Bakhshayesh. Il est aussi intéressant par ses petites dimensions (195X140 cm), inhabituelles pour les tapis de cette origine, en général beaucoup plus grands.