Tapis et kilims d'Anatolie occidental

Les origines des tapis y sont habituellement faciles à déterminer car liées à des appartenances géographiques bien précises. Parfois, des cas limites peuvent se produire et il devient assez difficile de localiser un tapis. Par exemple, lorsqu’ une femme se marie et quitte son village natal. Elle peut alors nouer une pièce selon la technique de son lieu de naissance avec le matériel et le dessin d’un autre endroit. L’appellation «Anatolie de l’ouest» est toutefois très vague et trop sommaire. Elle ne dit rien sur la technique et l’origine géographique. Elle s’étend entre Hereke au nord-ouest et Antalya situé 650 km au sud-ouest. Elle englobe les centres de production suivants: Istanbul-Hereke, Canakkale, Ezine, Bergame, Yuntdag, Bandirma, Yagcibedir, Balikesir, Karakeçili, Ghiordès, Kula, Uçak, Isparta, Afyon, Melas, Aydin, Manissa, reklvaçi, Fethiye, Antalya, Silifke et Adana.

La partie touristique du bord de mer comprise entre le détroit des Dardanelles et Antalya est maintenant desservie par de bonnes routes qui nous ont mené dans les antiques villes de Troie, Bergame, Ephèse et Aspendos. En Anatolie de l’ouest, il existe plusieurs provenances connues pour l’amateur de tapis antiques. A Bergame on a noué les fameux tapis Holbein aux 15ème et 16ème siècles.

Plus loin vers le sud se trouve Uçak, d’où provenaient les tapis Lotto, les Uçak à étoiles ou à médaillon. Au 18ème et 19ème siècles, Ghiordès, Kula et Melas sont devenus des centres de production importants.

Les tapis de Hereke

La petite ville de Hereke se situe au bord du golfe d’Izmit, sur la route et la ligne de chemin de fer qui relient Istanbul à Ankara. Sous le règne du sultan Abd-ul- Medjid, une manufacture de tissus y est fondée.

Vers 1890, sous le règne de Abd-ul- Hamid, des maîtres noueurs viennent de Sivas, Manissa et Ghiordès. Ils agrandissent la manufacture en y adjoignant un centre de nouage de tapis de haute qualité, tant par la taille que par la finesse. Il s’agissait de dessins d’inspiration française, iranienne et turque, donc très élégants. Ils sont restés célèbres sous le nom de motifs Osman, caractérisitiques de cette manufacture. Le tisserand de brocard et dessinateur Zareh Benjamin (Zara Usta) est resté célèbre par ses magnifiques et fins tapis de soie, brochés de fils d’or et d’argent.

Les Hereke anciens sont souvent signés et atteignent des prix énormes. La signature varie avec le temps. Aujourd’ hui, elle se trouve dans la bordure en haut à gauche et est écrite en caractères latins. La production de ces tapis de soie très fins (certains peuvent atteindre 8 millions de noeuds au m2), de très confidentielle jusque vers 1970, s’est développée ensuite et s’est étendue à toute la région d’Istanbul, d’Uskudar et à toute la partie à l’est du Bosphore. Actuellement, beaucoup de tapis de soie vendus à Istanbul viennent de Chine.

Panderma (Bandirma)

Les ateliers de Bandirma (autrefois Panderma) ont été fermés en partie juste avant la deuxième guerre mondiale. On ne peut donc admirer ces merveilleuses pièces aux tons subtils que dans les musées ou les collections privées. Très fins, ils présentent habituellement un motif de prière avec un mihrab uni dans de délicates nuances de vieux-rose, pistache, ivoire ou bleu pâle.

Les environs de Bergame

Les environs de Bergame Les tapis de Bergame sont connus depuis le 15ème siècle. On en distingue deux sortes: le type caucasien et le type anatolien.

La production récente est peu significative et comprend en outre, les Kiz- Bergame, les Yagcibedir et les Kozak.

Yagci-bedir

Bien avant que l’on ne tisse des tapis à Sindirgi, des Turkmènes et des Tcherkesses arrivèrent par les hauts plateaux anatoliens et s’installèrent dans cette région abritée par de larges montagnes. Les hommes travaillèrent aux champs, se consacrèrent à l’élevage de petit bétail et surtout mirent à profit les forêts denses pour en tirer du charbon de bois. Ils en fournissaient à Smyrne, la grande ville portuaire voisine. Ce métier de charbonnier leur permettait à peine de vivre et lorsque, avec le progrès, les foyers s’éteignirent les uns après les autre, un homme providentiel vint les sauver. C’était le Yagci-bedir, ou marchand de beurre qui passait de maison en maison pour vendre son délicieux produit. Sur son chemin, il entendait les confidences de ses clientes, qui se plaignaient de la dureté de la vie de charbonnier. Lui, racontait comment il arrondissait ses fins de mois en vendant des tapis et finit par leur apprendre à en nouer. Exigeant, il leur enjoignit de n’utiliser que la meilleure laine et d’exécuter leur travail avec le plus grand soin. Seul, le meilleur était assez bon. Il fut écouté et suivi si bien que ces excellents tapis se vendirent comme des petits pains et portèrent le nom de Yagci-bedir. Je pourrais encore mentionner de nombreuses provenances, par exemple les kilims de Aydin, les tapis de Melas et de Fethye. Les tissages d’Adana mériteraient aussi une mention.

Ces dernières années, la Turquie a beaucoup changé. Ses efforts pour devenir membre de la communauté européenne ont influencé le cours de change. Le tourisme et l’industrialisation ont provoqué une hausse des revenus. Bref, les tapis turcs deviennent toujours plus chers en comparaison des iraniens. Ils seront bientôt inaccessibles, même pour des suisses. De nombreux métiers à tisser restent inutilisés dans les maisons et les manufactures. L’art du point noué se perd-il lentement? Le fait est qu’il devient de plus en plus difficile de trouver des tapis de bonne qualité.

 

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Les kilims de Bergame et de Balikeshir

Les djovals, les couvertures, les kilims et les djadjims de Bergame présentent des motifs très semblables à ceux du Karabagh en république d’Azerbaïdjan. La plupart sont tissés à la maison.

 

Le projet Dobag

Dans la deuxième moitié du 20ème siècle, le professeur et collectionneur de tapis allemand, Dr. Harald Böhmer se demanda pourquoi la qualité des tapis turcs avait tant baissé ces dernières années. Le nouage devenait de plus en plus grossier et surtout, les couleurs perdaient leur éclat après peu de temps alors que celles des anciens tapis de musées étaient toujours aussi lumineuses quelques siècles plus tard. Après avoir étudié ce phénomène, il en arriva à la conclusion qu’en 80 ans les anciens colorants végétaux avaient cédé la place aux colorants industriels. Plus aucune manufacture turque n’utilisait les méthodes traditionnelles de teinture et tout le savoir faire accumulé pendant des siècles s’était perdu en trois générations. Böhmer, avec l’aide du département de chimie de l’université de Marmara, fit des essais et retrouva les anciennes recettes. Les racines de garance pour le rouge, la camomille pour le jaune, l’indigo pour le bleu et bien d’autres.

En 1982, il réussit, avec l’appui de l’aide au développement, à fonder à Ayvaçik et dans le Yuntdag, deux coopératives qui produisaient des tapis d’excellente qualité d’après les méthodes traditionnelles. Une de ces coopératives a même été la première de Turquie à être dirigée uniquement par des femmes. Bien que Dobag soit un projet d’aide au développement, il couvre ses frais par la vente de tapis directement aux détaillants étrangers.

Ghiordès

L’ancienne ville de Ghiordès a fourni une prestation de pionnière dans le domaine du tapis. Elle a, de plus, donné son nom à un noeud appelé maintenant: «noeud turc» ou plus exactement: «noeud symétrique ». Ce haut lieu du tissage de tapis connut une triste fin; il fut incendié et détruit totalement en 1922, pendant la guerre entre les Grecs et les Turcs.

 

Kömürçü Kula

Caractérisés par un fond brun foncé, ces tapis des environs de Kuba ont reçu le surnom de Kömürçü, qui signifie charbonnier. Par leurs petites dimensions, ils servaient souvent pour le culte des morts. On en couvrait le catafalque du domicile du défunt jusqu’au cimetière.

 

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